mardi 15 décembre 2015

Le retour des Jeux Spécialistes : une fausse bonne nouvelle ?

Les Jeux Spécialistes, quand GW inventait encore...
Comme à peu près n'importe quoi depuis l'avènement de l'interweb globalisé, le monde de la figurine n'est pas exempt de rumeurs. Surtout autour du géant de la figurine Games Workshop. Aussi quand un tract mal bidouillé est apparu annonçant le retour des Jeux Spécialistes, personne n'y a d'abord cru. Les licences récupérées par des éditeurs de jeux vidéos, permettant surtout de proposer des jeux . Sabordée par Games Workshop voilà quelques années, cette branche annexe dédiée à des jeux toujours vendus mais plus soutenus par aucune sortie sonnait le glas des espoirs de bien des joueurs à l'ancienne, que des jeux inventifs et des propositions ludiques originales avaient su séduire. De bagarres spatiales en combats dans les bas-fonds d'une cité médiévale en ruines et jusqu'à une compétition sportive autour de races du monde de Warhammer, des jeux comme Battlefleet Gothic, Mordheim ou Blood Bowl contribuèrent largement à populariser le nom de Games Workshop dans le monde entier. Aussi quand la firme de Lenton, sans doute plus ou moins contrainte par l'inflation des rumeurs, confirma la résurrection des Jeux Spécialistes, le coeur de nombreux joueurs se gonfla d'autant d'espoir que les réseaux sociaux de hauts cris. Paradoxalement pourtant, le retour de la firme anglaise vers des propositions disparues pourrait ne pas être une aussi bonne nouvelle qu'espéré.
Un peu forcés par l'annonce d'un de leurs responsables de magasin en Australie, Games Workshop confirme le retour des Jeux Spécialistes. Pour le meilleur ou pour le pire ?

Qu'on aime ou non les choix artistiques et esthétiques de la marque anglaise, il faut reconnaître que le savoir-faire accumulé par des années de productions de figurines leur permet aujourd'hui de sortir des kits magnifiques. Dès lors, il est légitime de penser que les futurs produtuis bénéficieront également de cette qualité de production, permettant de proposer soit des kits simples à monter, soit des grappes plus fournies proposant une belle modularité. Que l'on soit à Blood Bowl, à Necromunda, ou à Battlefleet Gothic, la nouvelle est de taille. Les dernières figurines sortis pour ces jeux accusant leur âge. L'âge justement, est aussi un facteur essentiel. Plus soutenus depuis une dizaine d'années, ces univers forts surent capter l'attention du public, pas toujours forcément joueur au départ, pour l'inciter à se plonger dans des ambiances marquées soutenues par une imagerie forte et, pour l'époque, originale.
Des punks, des crânes, des pointes, des gros flingues : l'imagerie d'une époque comprise et utilisée habilement par GW pour Necromunda. Une belle peinture de Geoff Taylor.
Sans remettre en cause l'intérêt originel des jeux évoqués, plusieurs questions demeurent cependant. Bien que délaissés par la maison jaune et rouge, ces jeux continuent à vivre pour part dans la mémoire collective des joueurs qui y vécurent de belles aventures à l'époque, mais aussi à travers des communautés de fans bien vivaces aujourd'hui encore. Evidemment, en tête, Blood Bowl reste dans tous les esprits. Son approche décalée et ses règles solides ont assuré au jeu de Jervis Johnson une longévité sans précédent sur laquelle nombre de fabricants tiers ont su capitaliser. Le nombre de campagnes de financements pour des figurines alternatives pour les nombreuses races jouables est impressionnant tout comme le nombre de joueurs qui continuent de pratiquer ce jeu (la récente Coupe du Monde ayant eu lieu en Italie ne constituant qu'une preuve supplémentaire de la communauté internationale des joueurs).
Ahhh les illustrations d'équipes de la deuxième édition de Blood Bowl ! Ils sont pas mignons les Reavers avec leurs maillots moulants ;)
 A une moindre échelle, des jeux comme Mordheim et ses escarmouches sanglantes dans les ruines d'une cité laissée aux mains des mercenaires de tous poils ou Necromunda et ses déclinaisons "inquisimundesques" continuent de titiller les dés et les pinceaux des peintres et convertisseurs de tous poils ravis de trouver dans les postulats de ces propositions ludiques de quoi alimenter une créativité saisissante. De la même manière, Epic ou Battlefleet Gothic restent des jeux défendus par des joueurs et des hobbyistes passionnés et talentueux. Dès lors, la renaissance de ces univers ludiques a de quoi passionner. De fait donc, on pourrait arguer que ces jeux, libérés du joug d'une maison-mère y gagnent une belle possibilité de se développer dans le sillage de communautés dynamiques et enthousiastes, en France, comme ailleurs.
Comme Blood Bowl, Epic (et ses éditions-déclinaisons) reste un jeu très populaire et encore pratiqué, en dépit de l'abandon de la gamme par les jaunes et rouges de Lenton. (allez voir les superbes images du Vénérable Zaius par exemple)
Si GW revient sur ces univers, une question de taille risque de surgir : celle des règles. Les chances sont minces de voir GW reprendre le jeu tel qu'il était lors de sa dernière incarnation pour n'en donner qu'une version remise au goût du jour sur le plan des figurines. Les fans du monde entier risquent donc d'être pris devant un choix pas forcément évidemment : rester dans le petit nid amoureusement creusé par des passionnés ou replonger dans le système GW ? Si la question est lointaine, il n'en demeure pas moins qu'elle finira par se poser... et créer de nouvelles ruptures entre les joueurs entre ceux qui resteront sur leur version chérie parce que peaufinée et ceux qui adopteront les nouvelles mécaniques. Toutefois, ces questions de systèmes restent annexes, car derrière l'enthousiasme largement partagé que soulève ces nouvelles, c'est une autre démarche qui se dessine.
A la benne les vieux jeux ? GW arrive avec des nouvelles boîtes, plus belles, plus grosses, plus chères... et plus light ? Tout change mais rien ne change...
Là où dans les années 90, ces jeux se posaient en nouveautés originales et inventives, plus de vingt ans plus tard, c'est loin d'être le cas. Du panel des jeux spécialistes, seul Blood Bowl reste pour l'instant à peu près seul sur son créneau, en attendant un possible Dreadball fantasy ? Pour le reste, force est de constater que tant sur les affrontements spatiaux Dropfleet Commander de Hawk Wargames, Firestorm Armada ou Halo Fleet Battles chez Spartan Games que sur les affrontements de vastes armées Planetfall ou Dropzone Commander, en attendant Age of Tyrants et bien d'autres... Que fait donc GW sur des niches abandonnées et que d'autres ont largement colonisées depuis, et parfois avec talent ? Comptant inévitablement sur le facteur nostalgie lié à ces univers par lesquels nombre de joueurs sont passés, la firme anglaise espère tirer son épingle du jeu en sortant de nouvelles éditions de ses vieux hits... ou susciter de nouvelles passions dans le sillage des jeux vidéos tirés de ces univers.
"Du haut de ces boîtes de jeux, quelques décennies vous contemplent...". Mais une recette qui ne change pas ? Faire du neuf avec du vieux : GW jouerait sur la nostalgie pour faire tourner la machine à billets ?
Une fois passée l'excitation première de revoir les jeux de notre jeunesse revenir, un constat s'impose : ce n'est guère innovant. Plutôt que d'aller chercher des idées et des propositions nouvelles, GW se contente de réactiver des vieilles licences ? Voilà une perspective qui ne semble pas refléter une créativité et un dynamisme affolants... Si l'épisode Dreadfleet a refroidi GW, la faute en incombe peut-être a une proposition mal dosée. Narrativement intéressante, elle laissait peu de place à un jeu sur la durée, préférant une campagne certes agréable et des figurines magnifiques, à un système ouvert permettant de jouer de longues heures. Assassinorum : execution force et Betrayal at Calth, tout bien emballés, misaient de même davantage sur les figurines qu'ils contenaient que sur les propositions ludiques qu'ils faisaient. Non que les jeux ne soient pas intéressants, au contraire, ils ont chacun des mérites différents, mais leur rejouabilité se révèle quasi nulle, là où Necromunda, Mordheim ou Blood Bowl permettent de jouer des heures sans effet de lassitude.
Blood Bowl, un paquet d'années sur les terrains et toujours vaillant. Plus que jamais pourrait-on dire en dépit d'adaptations vidéoludiques discutables.
En l'état, Games Workshop (qui a même dû recruter une équipe pour relancer cette division des jeux spécialistes, c'est dire l'état de leur équipe créative) ne semble donc pas faire de pas en avant mais deux bons pas en arrière pour chercher à revenir vers un âge d'or disparu... pour de bon. Certes, cela risque de donner lieu à de jolies sorties et à de beaux kits, mais à quoi bon ne chercher qu'à refaire. L'exemple d'Age of Sigmar, s'il remplit parfaitement la case du jeu occasionnel et léger en termes de règles, manque clairement d'aspérités (je ne parle que de mécanique, pas de direction artistique). Des sorties régulières mais espacées seraient annoncées, et si des espoirs légitimes accompagnent ces nouvelles (une version escarmouche de Warhammer 40000 reste un vieux rêve de fan qu'un Necromunda dépoussiéré pourrait toucher du doigt, quant à Mordheim, si le background ne se calque pas sur Age of Sigmar, c'est un dernier coin du Vieux Monde que nombre de fans pourraient prendre plaisir à arpenter), la prudence reste de mise au vu des choix récents de Games Workshop qui, comme Hollywood ou Disney avec Star Wars ne semble pas capable de faire autre chose que de recycler. Ici comme ailleurs, il est urgent d'attendre.
Ah, ah. L'Empereur et ses sbires vous ont à l'oeil, bandes de FBDM. :)

2 commentaires:

  1. Bien que je prenne tout çà avec des pincettes, je pense que ça ne peut augurer que du bon. Le retour de ces références est un souhait de longue date de nombreux fans donc voir GW investir dans ce sens signifie qu'ils sont à nouveaux plus à l'écoute. Je n'ai jamais été dans le délire de tout diaboliser ce qu'ils font même si de nombreux choix ne sont pas à mon goût.
    Ils ont un savoir faire qui est indéniable donc s'ils décident de réinvestir l'escarmouche futuriste avec Necro ou fantasy avec Mordheim, ce ser aavec de bons produits au moins au niveau figurines et décors donc il prendront leur part sans aucun doute.
    S'ils décident de reprendre leur part du gâteau Blood Bowl, c'est pareil, c'est tardif mais bienvenu, il va être coton cependant de reprendre une place qu'ils ont laissé vacante...
    s'ils veulent se remettre à faire des choses que les gens veulent acheter et pas seulement sécuriser leur PI en retouchant/renommant tout, grand bien leur fasse, ca ne fera que du bien au hobby en règle générale.

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    1. Sur le fond je suis bien d'accord avec toi, mais je dois dire que je n'aurai pas été contre une proposition nouvelle, plus originale ou différente.
      D'autres ont investi ces niches avec parfois du talent et j'ai peur que GW ne soit pas forcément à la hauteur sur le fond, les règles (sur la forme on est d'accord que des kits de gangers Necromunda ou d'équipes de Blood Bowl en plastique, ça fait rêver tout le monde). ;)

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