jeudi 3 septembre 2015

Mantic Games, vers l'infini et au-delà (2ème partie)

"Ack ! Ack ! Ack !" : Mars attaque de nouveau sous la houlette de Mantic Games.
Après trois projets fructueux sur Kickstarter (quatre en comptant Loka, lire la première partie ici), la firme créée par Ronnie Renton dispose désormais d'une gamme étoffée, d'une assise grandissante sur les tables de jeux et dans les têtes des joueurs et d'un catalogue de plus en plus fourni. Fin 2013, c'est une autre évolution qui se profile pour Mantic, celle du jeu à licence. Jusque là confinée dans l'exploration des chemins très balisés du médiéval-fantastique ou de la science-fiction, la société anglaise franchit un nouveau cap en annonçant à l'automne 2013 un jeu basé sur la licence Mars Attacks ! (au départ un jeu de cartes à collectionner né en 1962). Une fois encore c'est sur la plate-forme de financement participatif Kickstarter que le jeu est proposé au public, lequel répond une nouvelle fois présent en apportant 558 000$ pour donner vie au jeu. Peu connue dans le pays de Rabelais (si ce n'est via le film éponyme de Tim Burton), la licence est plus réputée dans les pays anglo-saxons aussi. Cette nouveauté constitue donc un vrai test pour Mantic à au moins deux niveaux : défendre une licence et se faire une place au-delà du cercle des figurinistes chez qui le nom de la firme anglaise évoque déjà quelque chose.


Passé à la moulinette Mantic, le jeu propose une expérience assez light mais fidèle visuellement à l'univers
Le jeu est un succès et avec sa recette habituelle (figurines potables, système efficace et matériel correct), Mars Attacks ! fait la jonction entre les tables des gros joueurs et le salon de M. Tout-le-monde. Les figurines de la boîte sont de base livrées en deux couleurs différentes, avec quelques décors et les règles proposées par Jake Thornton évoquent un Deadzone light. En somme, le jeu se veut simple et abordable par tous, ce en quoi il réussit plutôt bien son pari. Evidemment au pack de base s'ajoutent vite les traditionnels boosters et concepts financés via KS.
Dreadball Xtreme : du Dreadball underground et brutal, mais fiunalement pas si original
Dès le projet suivant toutefois, Mantic change quelque peu de cap. Le début de l'année 2014 voit ensuite une autre campagne bien moins originale arriver sur la plate-forme de financement participatif : Dreadball Xtreme. Loin de révolutionner le jeu de base (Dreadball) proposé un an et demi plus tôt sur Kickstarter, cette nouvelle campagne prolonge l'expérience en ajoutant de nouvelle façon de composer une équipe et d'appréhender le jeu notamment via des stades différents et un mode plus éloigné du confort des arènes standards. Certes, le tout prolonge l'expérience Dreadball mais sans aucunement en bouleverser les fondamentaux. Cependant, cette campagne réunira tout de même 575 000$ (contre 729 000$ pour la première) et marque pour Mantic un changement de stratégie... et une fuite en avant ?
Dungeon Saga, où comment Mantic explore à sa façon un terrain connu et juteux : le dungeon crawl. Porte, montre et 1 million de $ sur Kickstarter)
La suite arrive en août 2014 : plus question ici de financer et produire quelque chose de totalement nouveau mais bel et bien de retourner explorer un sentier déjà visité. Dungeon Saga, s'il entend franchir un cap qualitatif (et quantitatif !), démarre en effet comme un retour à Dwarf King's Hold, modeste boîte de jeu en forme de clin d'oeil aux dungeon-crawlers de jadis. Flairant le bon filon (et coupant l'herbe sous le pied d'un remake d'Heroquest), la marque anglaise se lance cette fois dans un projet à plus grande échelle : système de jeu plus ambitieux (toujours imaginé par Jake Thornton, vous l'aviez deviné), pléthore de figurines dans la boîte, règles supplémentaires pour personnaliser sa partie, extensions, etc. Le jeu fait un carton (1 057 000$ sont récoltés par Mantic) tout en laissant un petit goût de déjà vu. Pour autant, le projet est ambitieux et il faut reconnaître que certaines figurines sont de vraies réussites. Le jeu arrivant sous peu, on en entendra sans doute reparler bientôt.
Kings of War 2 arrive : comme pour faire la niak à son rival, chez Mantic, on joue sur une table GW. Et ouais, pour eux, Kings of War a déjà supplanté Warhammer Battle, récemment décédé
Si Dungeon Saga se présente comme une nouveauté, plus qu'une réédition augmentée et révisée de Dwarf King's Hold, Kings of War, qui revient sur Kickstarter à l'automne 2014, n'entend pas révolutionner la première édition du jeu mais en lisser les mécaniques tout en permettant de financer la création de nouvelles armées. Une somme quasi équivalente à la campagne pour la première édition du jeu proposée 2 ans et demi plus tôt est récoltée permet au jeu de passer un cap : ouvrage cartonné et version de poche pour les règles et nouvelles unités, lentement le jeu commence à rivaliser avec les autres propositions du marché. D'autant que Battle vit ses derniers jours avec The End Times et que l'arrivée d'Age of Sigmar laisse les amateurs de grosses unités et de jeu compétitif complètement sur le carreau.
Les skavens de l'espace envahissent Deadzone et servent d'excuse au lancement d'une nouvelle campagne de financement... pour rééditer un bouquin de règles devenu brouillon.
Vient le printemps 2015 et le dernier projet en date pour Mantic, encore une prolongation d'un jeu déjà existant : Deadzone : Infestation qui introduit de nouvelles factions et révise quelques points de règles en offrant un livre réorganisé pour l'occasion. Rien de bien révolutionnaire d'autant que les décors futuristes modulables qui expliquaient en partie le succès de la campagne originale sont ici moins nombreux. Seuls 380 000$ sont récoltés cette fois.
Passée l'inventive folie des débuts, Mantic se concentre donc sur ses jeux et ses univers maisons, rien de bien critiquable en soi, hormis peut-être le besoin systématique de recourir à Kickstarter pour toute nouvelle sortie. Loin de l'anonymat des débuts, la firme anglaise a su se construire une image auprès de la communauté ludique. De ses mécaniques soignées à des gammes de figurines qui gagnent en qualité, le pari audacieux de Ronnie Renton porte ses fruits, ce qui rend d'autant moins compréhensible l'usage systématique au financement participatif, la structure ayant maintenant sans doute une assise financière plus confortable.
Kings of War : "le" jeu des batailles fantastiques ? Un joli coup ou une belle opportunité pour Mantic de rallier les déçus de GW.
En outre la multiplication des projets tend aussi à créer des mécontents quand quelques ratés interviennent. Kickstarter, de bel outil peut aussi devenir un piège, gardant en mémoire les commentaires et les remarques parfois acerbes des déçus ou témoignant de l'abandon ou du manque de suivi d'une gamme. Erreurs de jeunesse ou défauts structurels, ces petits ratés et flous (le suivi des gammes est parfois aléatoire, devient très épisodique une fois les campagnes participatives achevées, voire inexistant. Et le service client manque parfois de réactivité, mais jamais de gentillesse) devront être corrigés pour confirmer le statut qu'entend revendiquer Mantic sur les tables et dans le coeur des joueurs. Coïncidence heureuse, Kings of War 2 sort alors que Games Workshop abandonne Warhammer Battle. Mantic a donc beaucoup à gagner en s'attachant les fidèles de GW déçus par les choix récents de la firme rouge et jaune. C'est d'ailleurs vers eux que la nouvelle édition de Kings of War se tourne en ayant désormais beau jeu de se revendiquer le titre de "jeu des batailles fantastiques" longtemps trusté par Battle. Quant à savoir si le jeu tient ses promesses, ce sera l'objet d'un prochain article.

XXXXXXXXXX

La première partie de l'article
Le site de Mantic

2 commentaires:

  1. je dois dire que je goût asse peu quand des structures importantes et établies passent par le financement participatif pour faire porter le risque sur les clients. On peut reprocher beaucoup de choses à GW mais il faut leur reconnaître de l'audace dans les choix qu'ils font (que ca plaise ou non est purement subjectif) et surtout de l'investissement (même si parfois avec un temps de retard). Autant soutenir un KS ou autre crowdfunding pour des équipes réduites de passionnés qu veulent se "lancer" me parait essentiel autant soutenir les boites qui ne sortent que des projets financés par les autre me gonfle surtout quand les concepts sont plus du domaine de l'opportunisme (comme tu le fais remarquer). Sauf erreur le Kickstart c'ets le coup de pied pour démarrer sa moto, pas refaire le plein en route...

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Tout à fait d'accord. C'est ce qui me fait dire que Mantic abuse un peu (voire davantage) du procédé. J'espère que les coûts des premières campagnes ne sont pas les raisons des suivantes parce qu'ils courent dans le mur. Spartan Games ne s'est jamais lancé dans le participatif et ne s'en sort pas moins bien. J'espère que Mantic perdra cette habitude systématique qui n'est en effet plus du soutien à une boîte et un projet qui en ont besoin mais un moyen de générer du cash et de faire de la communication et de la prévente à moindres frais pour eux. Dévoyé comme ça le procédé perd son sens à mon avis.

      Supprimer

Un petit mot ? Une réaction ? Ca se passe ici :)