Avant le début du deuxième millénaire de notre calendrier grégorien, Games Workshop inventait encore des propositions ludiques. Tant dans le futur envahi de guerre et de personnages tous plus biscornus les uns que les autres qu'à travers les étendues fantastiques et crasseuses du Vieux Monde, les possibilités de faire mordre la poussière à des adversaires plus ou moins valeureux mais en tout cas très bigarrés ne manquaient pas. Au nombre des bonnes idées de la firme jaune et rouge, il y eut Mordheim, un jeu né d'une idée simple : incarner des bandes restreintes de personnages dans une cité en ruine pleine d'opportunité, bonnes ou mauvaises. Ajoutez-y la possibilité de gagner de l'expérience et de jouer en campagne, et vous obteniez le jackpot.
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"Par la lance de Myrmidia, y'a des bestioles partout dans c'te ville !" |
Puisant dans l'imagerie développée depuis des années pour Warhammer Battle (la version avec au moins 50 figurines sur la table et aucune gestion de progression), Mordheim s'en démarque en proposant une échelle plus ramassée autour d'une bande de combattants d'une quinzaine de personnages au grand maximum. Au fil du temps, et dans le sillage des bandes de départ, chaque faction disponible dans Battle s'est vue transposée à Mordheim. Et certaines qui n'avaient pas vraiment d'armée ont même parcouru les rues de la sinistre cité (oui, même les amazones !). Si le substrat ludique de départ, sans trop s'éloigner de Battle (surtout , ne pas bouleverser la ligne de caractéristiques GW, figée depuis des lustres !) ne manque pas de finesse, l'amoncellement d'addenda et d'options nouvelles finit par déstabiliser un système pas toujours homogène.
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Des possédés, anatomiquement pas toujours homogènes non plus... |
Boîteux mais magnifique, l'univers de Mordheim titilla de nombreux joueurs, avides d'arpenter les rues de la ville détruite par une météorite en forme de comète à deux queues pour s'y affronter pour la richesse et la gloire. Comme pour Blood Bowl, autre pépite GW-esque sacrifiée sur l'autel d'une rentabilité érodée, Mordheim, après des années de bons et loyaux services finit par disparaître du catalogue des Jeux Spécialistes... sans que cela n'entame la passion des joueurs du monde entier pour le jeu et son postulat. Au contraire. Quand mon intérêt ludique fut chatouillé par une discussion amicale autour de l'idée de retourner arpenter les égouts et les étages de Mordheim, l'épineuse question de l'empilement de règles bancales surgit elle aussi. Fort heureusement, ladite passion, entretenue par des joueurs passionnés, a aussi débouché sur de belles propositions visant à rééquilibrer et harmoniser les règles du jeu.
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"Les gars ? J'ai un gros problème d'équilibre là..." ou comment certains joueurs osent poser des figurines sans couleur sur une table. |
Gratuitement, en 67 pages (certes sans les superbes illustrations qui donnaient sa couleur à l'univers original),
Coreheim permet donc de retourner sur la cité traversée par le Stir pour s'y affronter et voir sa bande progresser, souffrir et saigner pour un peu d'or ou de malepierre. J'entends d'ici les puristes hurler à Morrslieb (ou à Mannslieb d'ailleurs) invoquant l'absence de telle ou telle bande pourtant présente dans tel document d'époque, invoquant Sigmar et tous les autres dieux du Vieux Monde avant de vouer aux gémonies un système sur lequel aucun n'aura daigné pousser une figurine. Braillez brailleurs, tels des flagellants hurlants à qui veut l'entendre que le Vieux Monde court à sa perte, ces prêches hargneux ne convaincront que les convaincus, car mes petits bonhommes, Coreheim, c'est de la balle.
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"Tu vas arrêter de chialer sur ton Vieux Monde ouais !" |
De la bonne balle en métal de Nuln, capable de percer la plus solide des armures même. Certes, les bandes jouables sont réduites dans Coreheim (trois variantes de mercenaires humains, les chasseurs de sorcières, les morts-vivants, les skavens, les possédés et les gobelins), le figuriniste moyen aura tôt fait de trouver le moyen de pouvoir jouer ses nains, ses Soeurs de Sigmar ou ses amazones en adaptant l'une des bandes en question. Côté système, Coreheim ne s'embarrasse pas de rythmes de mouvements différents, harmonise la variété d'armes disponibles, lisse les compétences ainsi que la magie et introduit (avant The End Times et la v9 de Battle les profils monture/cavalier unifiés) tout en gardant des mécanismes propres à son ancêtre (mouvements puis tir puis corps à corps) et les caractéristiques made in Nottingham. Seule vraie différence : la disparitions des Dramatis Personae, stars de Mordheim. Là encore, seuls les irréductibles à tête réduite beugleront, si ces personnages ajoutaient de la couleur, l'équilibre en prenait parfois plein sa petite gueule d'innocent.
Le joueur inventif aura, lui, tôt fait de trouver une place à ses stars de l'escarmouche du Vieux Monde, soit en leur donnant un rôle au travers de scénarios maison, soit en leur bidouillant un profil adapté de ceux des Francs-Tireurs qui font toujours partie du voyage. Le retour à Mordheim en vaut-il la chandelle ? Sans aucun doute, malgré les hauts cris des hérauts de malheur, le Vieux Monde n'est pas prêt d'être dézingué par le Chaos, End Times ou pas End Times, les joueurs amoureux de son histoire et prêts à s'y amuser des heures encore ne manquent pas. L'âge du plastique facilite encore bien plus le travail du convertisseur (même novice) : nul besoin d'aller se ruiner chez des spéculateurs du marché virtuel quand la moindre boîte plastique et quelques rabiots vous offrent de quoi jouer de longues heures durant. Ma bande de mercenaires de la Croix Noire est née dans les bas-fonds d'une boîte à rabiots, et ne m'a coûté que le prix des socles que je voulais lui offrir pour lui donner une apparence à part.
Simple mais riche de nombreuses possibilités, Coreheim réussit joliment à faire vivre la flamme allumée par
Tuomas Pirinen, Alessio Cavatore et Rick Priestley voilà (déjà !) plus de 15 ans. Avec rien de plus que quelques figurines et une connexion internet, vous voilà prêt à arpenter le monde de l'escarmouche et du jeu en campagne. Certes les mécanismes n'ont rien de bien novateur mais là encore (comme tout ce qui touche à GW), c'est dans l'accrochage avec un univers riche et coloré et la possibilité de faire progresser son petit monde que le jeu prend toute sa saveur. Il suffit de parcourir les forums et sites de figurinistes du monde entier pour se convaincre qu'il a encore de beaux jours devant lui. Certes, les documents d'époque sont trouvables très aisément sur la toile, mais en harmonisant la puissance des différentes bandes et en évitant les défauts de l'époque Coreheim vaut largement son pesant de malepierre. Faites le test.
EDIT : A noter que les compères de Coreheim ont poursuivi l'aventure avec
Wyrdwars en proposant quelques variations de règles et surtout de nouvelles bandes permettant ainsi de jouer des nains, des Bretonniens, les Hommes-Lézards, des Arabiens ou toutes sortes d'elfes.
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